Le Professeur Lucas, dont la connaissance en matière de droit d’auteur est incontestable a conclu les travaux du colloque de l’ALAI (Association littéraire et artistique internationale) sur l’intelligence artificielle en affirmant : « il ne faut pas se précipiter dans ce secteur et le droit actuel peut s’y adapter »
Mais il n’a à notre sens que partiellement raison.
L’originalité d’une œuvre de l’esprit telle que définie par le droit positif aujourd’hui, ne permet pas en effet de considérer une œuvre générée par l’IA comme une création intellectuelle.
Cependant l’IA porte en elle des risques certains d’atteinte aux droits d’auteurs.
L’interprétation de la CJUE sur ce point a d’ailleurs évolué. Lorsqu’il est question d’œuvres générées par l’IA, elle n’exclut plus qu’une œuvre puisse être définie comme étant originale même si sa création a été dictée par des considérations techniques.
N’oublions pas que jusqu’à la mise en œuvre de la directive sur le droit d’auteur dans le marché du numérique, transposée en droit français en juillet 2019, nos créateurs ont vu leurs contenus pillés par les plateformes et la protection de leurs droits bafouée. Dans le même registre, c’est une évidence, l’IA générative reste une question préoccupante pour le droit d’auteur. S’il est cependant encore difficile d’en apprécier l’incidence, il est indispensable d’en identifier les problèmes rapidement, de travailler à des solutions d’adaptation à ce nouvel outil. Le plus tôt sera le mieux, pour anticiper les déconvenues liées à l’essor exponentiel et anarchique de ce système. Il faut peut-être déjà y réfléchir sous l’angle d’un droit spécial compatible avec le droit d’auteur. En revanche, l’Institut pense qu’il ne faut surtout pas vouloir réguler trop vite, par prudence d’une part parce que l’IA représente un enjeu de société important, et d’autre part nous manquons de recul pour apprécier l’évolution des avancées scientifiques et technologiques. Le secteur culturel doit cependant rester attentif.
Il ne s’agit pas de freiner le développement de l’IA, mais de se mobiliser sans appréhension, avec le discernement nécessaire pour en reconnaître les avantages et dangers. Sans nous inquiéter de cette accélération, mais en gardant à l’esprit que toute utilisation d’une IA générative porte en elle une possible violation du droit d’auteur si elle est effectuée sans l’autorisation des ayants droit.
Colette Bouckaert
Secrétaire générale de l’iDFRights