Les dernières évolutions de l’environnement numérique sont préoccupantes, présageant d’une détérioration du modèle de modération en ligne pourtant durement édifié au fil des années.

Les plateformes tendent à réduire progressivement leurs mécanismes de vérification des informations et les limites des expressions haineuses des utilisateurs. Les algorithmes qui privilégient l’engagement à tout prix, vont amplifier la diffusion de ces contenus afin de provoquer la violence, la peur et la xénophobie. Cette situation expose particulièrement les jeunes utilisateurs à des risques épouvantables qui rendent urgent le besoin d’équiper chacun face à la montée de la haine en ligne. La prévention et la sensibilisation sont une des solutions pour contribuer à faire d’Internet un lieu sûr, marqué par le respect et la tolérance.

Une mission au cœur des communautés

L’histoire de Respect Zone a commencé avec un constat personnel. Philippe Coen, son fondateur et ses deux enfants, ont été directement confrontés à la réalité brutale des abus en ligne par la création de groupes de messagerie diffusant un discours haineux et raciste contre un professeur.

Cette expérience est à l’origine de notre association, qui rassemble aujourd’hui des juristes, des experts du droit du numérique et des bénévoles engagés, tous unis pour développer des solutions inclusives et concrètes.

Notre action s’étend à chaque étape du processus des violences en ligne. De l’accueil et l’orientation des victimes et leur entourage lors de nos interventions ou en ligne, au travail de prévention et de formation effectué sur le terrain partout en France, tout en collaborant avec les pouvoirs publics et les plateformes numériques. La  clinique juridique illustre cet engagement concret, offrant un accompagnement juridique gratuit aux victimes de cyberharcèlement, grâce à l’engagement de nos avocats et juristes bénévoles.

Notre approche se veut résolument inclusive et positive, proposant un cadre de conduite pour les utilisateurs. Nous avons ainsi développé une Charte de conduite qui encourage chaque utilisateur à adopter un comportement respectueux, à bannir toute forme de discrimination et de violence verbale, et à privilégier des échanges constructifs et bienveillants.

Une urgence de sensibiliser et d’agir sur tous les territoires

Nous sommes profondément convaincus que la transformation des comportements en ligne passe avant tout par l’éducation et la sensibilisation de tous les publics. Cette conviction se traduit par le déploiement de programmes éducatifs, d’ateliers et de campagnes de sensibilisation au plus près des communautés, dans les établissements scolaires, les universités, centres sociaux, les entreprises, les municipalités ou les centres sportifs. Notre programme Respect Duels propose notamment une approche pédagogique originale pour sensibiliser les jeunes aux enjeux du respect en ligne.

En 2024, notre impact permanent a permis de sensibiliser 5.850 personnes, dont 70% de jeunes de moins de vingt ans. L’an dernier a également permis d’accompagner trois entreprises, quatre collectivités territoriales, ce qui démontre l’impact grandissant de notre démarche.

Notre présence territoriale s’étend, avec notamment l’engagement des villes d’Évry et de Sceaux qui ont rejoint notre démarche de labellisation. Ces municipalités démontrent qu’une politique locale active peut faire une réelle différence dans la lutte contre le harcèlement et les violences en ligne.

Depuis 2016, la ville de Chevry-Cossigny porte le label Respect Zone, incarnant un exemple remarquable de notre démarche sur le terrain. Cette commune fut pionnière en devenant la toute première municipalité à s’engager dans cette démarche de labellisation. L’initiative s’est concrétisée par la présence visible du label non seulement aux entrées de la ville et sur les édifices publics, mais aussi sur l’ensemble des supports de communication numériques de la municipalité, affirmant clairement que l’intolérance et la violence n’ont pas leur place dans l’espace public.

Partenaires depuis lors, nous poursuivons nos actions chaque année. En 2024, nous avons organisé avec les espaces jeunesse des conférences de sensibilisation qui ont permis de toucher près de 300 personnes, dont 250 jeunes, et avons également formé les équipes encadrantes des centres de jeunesse de la communauté de communes de l’Orée en Brie.

Notre action dépasse les frontières de la métropole, comme en témoigne notre programme ambitieux en Martinique. Nous allons y mener une tournée d’interventions de sensibilisation dans les collèges et lycées, combinant plusieurs actions complémentaires :

• La labellisation d’établissements scolaires
• Des sessions de sensibilisation au cyberharcèlement
• La formation d’ambassadeurs en soutien du programme pHARe
• Des conférences spécifiques pour le corps enseignant

Cette approche globale en outre-mer démontre notre capacité à adapter nos interventions aux spécificités locales tout en maintenant une cohérence dans notre mission de prévention.

Responsabiliser les plateformes et les États

Notre action ne se limite pas au terrain local. Nous entretenons un dialogue constant avec les plateformes et les instances gouvernementales pour promouvoir des pratiques en ligne plus respectueuses et faire évoluer le cadre réglementaire. Mais pour Respect Zone la responsabilité est partagée : chaque organisation, quelle que soit sa taille ou son domaine d’activité, doit contribuer à responsabiliser ses membres vers de meilleurs comportements en ligne.

Cette dynamique doit être soutenue par un engagement fort des autorités en faveur de la sensibilisation. Les plateformes numériques, en particulier, ont une forte responsabilité dans la lutte contre toutes les formes de haine. Une réglementation renforcée s’impose, et Respect Zone se tient à la disposition des acteurs pour contribuer à son élaboration et sa mise en œuvre.

La construction d’un Internet plus sûr et plus respectueux est un défi collectif qui nécessite l’engagement de tous. C’est uniquement par une action concertée, impliquant l’ensemble des parties prenantes de la société, que nous pourrons faire du respect numérique une réalité quotidienne.

Laura-Blu MAUSS

Coordinatrice – Respect-Zone