Le Data Privacy Framework à l’épreuve des nouvelles dispositions américaines
10 mars 2025

Le Data Privacy Framework (DPF) également connu sous le nom de « Transatlantic Data Privacy Framework », est un accord qui vise à réguler le transfert des données personnelles entre l’Union européenne et les Etats Unis. Il a été conçu pour répondre aux préoccupations relatives à la protection des données et à la vie privée des citoyens européens, suite à l’invalidation du texte précédent, le Privacy Shield, par la CJUE en juillet 2020. Cette décision avait  mis en évidence les risques liés à l’accès aux données européennes par les agences américaines.

Cette nouvelle initiative signée 2023 devait donc garantir des normes claires pour la collecte, le stockage et le traitement des données personnelles en prévoyant un  niveau de protection adéquat pour les données européennes transférées aux Etats Unis. Elle avait précisément pour objectif de pallier les incompatibilités constatées par le Privacy Shield.

Dès son lancement, le Data Privacy Framework a suscité de vives critiques, en raison de l’absence de bases législatives solides, dans la mesure où le texte reposait sur des décrets présidentiels américains qui pouvaient à tout moment être modifiés ou annulés, notamment au gré des changements de gouvernement tous les quatre ans. Cette instabilité institutionnelle représentait une menace sérieuse pour les Etats membres de l’Union européenne. 

Les débats de ces dernières semaines aux Etats Unis nous laissent dans  d’incertitude et si Data Privacy Framework venait à être dénoncé, les entreprises  européennes se retrouveraient face à des défis juridiques majeurs. Elles ne pourraient plus se baser sur ce cadre pour justifier leur  transfert de données s’exposant ainsi à ne plus pouvoir utiliser les services de clouds américains. Elles seraient alors contraintes à explorer des alternatives coûteuses et complexes pour se conformer aux exigences légales du RGPD et sécuriser leurs flux de données

L’administration américaine actuelle a déjà annoncé qu’elle avait l’intention de se prononcer sur le sort du  décret signé sous le gouvernement précédent qui sert de base à l’accord transatlantique. Pour l’Europe la situation est préoccupante comme l’indique l’avocat autrichien Max Schrems : « Il est difficile d’imaginer qu’un décret Biden, imposé aux Etats Unis par l’Europe et régulant l’espionnage américain à l’étranger, puisse survivre à la logique « America First » de Trump. »

Il est impératif que la Commission européenne réagisse rapidement à cette situation pour éviter que les entreprises et les structures européennes ne se retrouvent face à des obstacles fondamentaux qui entraveraient leurs opérations et leurs relations commerciales. Elle doit donc adopter des mesures appropriées en urgence pour assurer à l’économie numérique européenne de pouvoir continuer à transférer ses données en toute légalité et sécurité.

Jean-Marie CAVADA

Jean-Marie Cavada

Président iDFrights

Colette Bouckaert

Colette Bouckaert

Secrétaire générale iDFrights

Suivez-nous

Sur Linkedin

Plus d’articles

Non, les GAFAM ne sauraient être au-dessus des lois !

Non, les GAFAM ne sauraient être au-dessus des lois !

Sous prétexte de liberté de chercher, de créer, d’innover, d’entreprendre et de s’enrichir, les géants du numérique estiment que toute réglementation et son application par le juge constituent des entraves illégitimes à leur avidité « no limit ».
Tout ceci est évidemment affirmé au nom de grands principes, en premier lieu la liberté d’expression. En fait, elle masque la licence, au sens de l’abus de droit de cette liberté.

lire plus
Ni herbivore ? Ni carnivore ? Européens !

Ni herbivore ? Ni carnivore ? Européens !

Au 21e siècle, le marqueur étant le « Nine Eleven », nous assistons pour paraphraser Fukuyama, « au retour de l’histoire ».
Elle ne nous avait quittés qu’une dizaine d’années !
Au début des années 90, Helmut Kohl s’exclamait : « nous n’avons plus d’ennemis ».
Ce qui signifiait la fin du monde hobbesien et l’entrée dans l’ère kantienne : donc Fukuyama n’avait pas tort !

lire plus