INTELLIGENCE ARTIFICIELLE
- La Commission a publié le premier projet de code de bonnes pratiques sur l’intelligence artificielle (IA) à finalité générale.
Cette première version du code de bonnes pratiques a été élaborée par les experts indépendants nommés par le Bureau de l’IA à la présidence et à la vice-présidence des quatre groupes de travail du Code de pratique général sur l’IA. Ce premier projet s’appuie sur les contributions d’une consultation multipartite organisée par le Bureau de l’IA, ainsi que sur un atelier spécifique réunissant des fournisseurs de modèles d’IA à usage général. Le document sera examiné plus avant la semaine prochaine dans les quatre groupes de travail qui se tiendront du 18 au 21 novembre, et le 22 novembre lors de la plénière sur le code de bonnes pratiques.
Dans le cadre de la session plénière consacrée au code de bonnes pratiques, les parties prenantes, les représentants des États membres de l’UE ainsi que les observateurs européens et internationaux sont invités à formuler des observations par l’intermédiaire d’une plateforme spécifique d’ici au 28 novembre afin de contribuer à l’élaboration des prochaines versions du code de bonnes pratiques. Le document final devrait être publié et présenté lors d’une plénière de clôture en mai 2025.
Les règles régissant les modèles d’IA à usage général au titre de la législation sur l’IA entreront en vigueur en août 2025. Le code de bonnes pratiques vise à faciliter la bonne mise en œuvre de ces règles et jouera un rôle crucial dans l’orientation du développement et du déploiement futurs de modèles d’IA à usage général fiables et sûrs dans l’UE.
Les principaux aspects du code comprennent des détails sur la transparence et l’application des règles relatives au droit d’auteur pour les fournisseurs de modèles d’IA à usage général, ainsi qu’une taxonomie des risques systémiques, des méthodes d’évaluation des risques et des mesures d’atténuation pour les fournisseurs de modèles avancés d’IA à usage général susceptibles de présenter des risques systémiques.
- La Commission examine sept candidatures pour monter des « usines d’IA » européennes
Les sept propositions soumises au total par 15 États membres et deux États participants associés témoignent d’un très grand intérêt pour cette initiative qui doit ouvrir des capacités de supercalculateurs européens (EuroHPC) à des filières comptant investir dans l’intelligence artificielle (IA).. Des propositions visant à construire une usine d’IA autour d’un supercalculateur existant ou d’un nouveau supercalculateur adapté aux besoins de l’IA ont été soumises par la Finlande (avec la participation de la Tchéquie, du Danemark, de l’Estonie, de la Norvège et de la Pologne), le Luxembourg, la Suède, l’Allemagne, l’Italie (avec la participation de l’Autriche et de la Slovénie), et la Grèce. En outre, l’Espagne a préparé une proposition avec la participation du Portugal, de la Roumanie et de la Turquie, qui devrait être présentée sous peu.
Les premières doivent être mises en place dans les cent premiers jours du nouveau mandat d’Ursula von der Leyen. La vice-présidente exécutive désignée au Numérique et à la Souveraineté technologique, Henna Virkkunen, avait relayé son ambition, fixant à cinq lancements au début de son mandat l’objectif de la présidente. Ces « usines d’IA », qui visent à augmenter la puissance de calcul disponible pour l’IA en Europe, seront interconnectées et mises à la disposition des start-up, de l’industrie et des chercheurs européens dans le domaine de l’IA. Elles sont un des paris technologiques et stratégiques de l’UE pour revenir dans la course mondiale à l’IA.
L’appel à candidatures a été ouvert en septembre. Une seconde vague de projets est attendue pour le 1ᵉʳ février 2025.
- La Commission lance une consultation sur les interdictions prévues par la loi sur l’IA et la définition des systèmes d’IA
L’Office de l’IA lance une consultation ciblée des parties prenantes sur les futures lignes directrices relatives à la définition des systèmes d’IA et à la mise en œuvre des pratiques d’IA présentant des risques inacceptables en vertu de la loi sur l’IA. Ces lignes directrices aideront les autorités nationales compétentes ainsi que les fournisseurs et les déployeurs à se conformer aux règles de la loi sur l’IA relatives à ces pratiques d’IA, avant la mise en œuvre des dispositions pertinentes à compter du 2 février 2025.
Le Bureau de l’IA invite les parties prenantes, notamment les fournisseurs de systèmes d’IA, les entreprises, les autorités nationales, les universités, les instituts de recherche et la société civile, à soumettre leurs contributions. Elles alimenteront les lignes directrices de la Commission sur la définition du système d’IA et les pratiques d’IA interdites en vertu de la loi sur l’IA, qui seront publiées au début de l’année 2025.
Les concepts juridiques relatifs à la définition du système d’IA et aux pratiques d’IA interdites sont établis dans la loi sur l’IA. La consultation vise également à recueillir des cas pratiques supplémentaires de la part des parties prenantes afin d’alimenter les lignes directrices et de clarifier davantage les aspects opérationnels et les cas d’utilisation.
Pour accéder à la consultation ouverte durant 4 semaines, jusqu’au 11 Décembre 2024, c’est ici, enfin here, puisqu’elle est disponible en Anglais.
DMA/DSA
- Entre« ciblage ou paiement », Meta explore une troisième voie avec la publicité contextuelle
Son système « ciblage ou paiement » qui impose le paiement d’un abonnement comme seule alternative à la publicité ciblée avait été sévèrement épinglé par la Commission européenne dans l’enquête ouverte en mars dernier contre Meta, au titre du règlement sur les marchés numériques (DMA). La vague de protestations face à ce non-choix à peine maquillé avait enflé au fur et à mesure que les organisations de consommateurs avaient testé la formule payante dans différents pays européens, tous soumis à des prix d’abonnement à ce point élevés que même les Cnil européennes les avaient estimés dissuasifs pour les consommateurs, les poussant à épouser la publicité ciblée comme étant une meilleure solution qu’un abonnement.
Meta n’a d’ailleurs pas caché que cette troisième voie lui avait été imposée par la Commission européenne et l’enquête qui la conduisait à appliquer ses textes règlementaires, qui vont selon elle beaucoup trop loin dans leurs injonctions et plombent l’essor européen du secteur. Une communication poussive de la maison mère de Facebook et d’Instagram sur le fait que la publicité contextuelle consommait moins de données personnelles et qu’elle était donc moins intrusive n’a pas dissipé l’impression que Meta était contraint à un « retour vers le futur », finalement pas très éloigné de la bonne vieille pub qui passait à la télé pendant un match de foot pour plutôt privilégier les spots vantant des chips et des pneus autos que des coffrets Barbie va au musée ou une lessive, déduisant de quelques éléments de contexte comme « match, OM-PSG, samedi soir » que tel annonceur aurait plus de chances de rencontrer son public avec tel produit qu’un autre.
D’autres mots et d’autres technologies pour remettre au goût du jour la publicité contextuelle made by Meta, bien moins gourmande en données personnelles que la publicité ciblée et malgré une expérience moins personnalisée, une heureuse conclusion sur la troisième option, qui aurait plu à Francis Bouygues : grâce à la publicité contextuelle, Meta va pouvoir diffuser plus d’annonces et ainsi proposer que cette troisième option soit gratuite. L’entreprise s’est moins étendue sur une autre annonce qui aurait pourtant mérité plus de commentaires : la réduction de 40 % du prix de son abonnement sans publicité ciblée – une baisse dont le taux aurait fait rêver bien des ministres de l’Économie en ces temps d’inflation !
CONCURRENCE
- La Commission européenne inflige une amende de 797,72 millions d’euros à Meta pour des pratiques abusives au profit de Facebook Marketplace
En juin 2021, la Commission a ouvert une procédure formelle sur un possible comportement anticoncurrentiel de Facebook. En décembre 2022, la Commission a envoyé à Meta une communication des griefs, à laquelle cette dernière a répondu en juin 2023.
L’enquête de la Commission a révélé que Meta occupe une position dominante sur le marché des réseaux sociaux personnels, qui couvre au moins l’Espace économique européen (EEE), ainsi que sur les marchés nationaux de l’affichage publicitaire en ligne sur les médias sociaux. La Commission a constaté que Meta avait abusé de sa position dominante en enfreignant les règles de l’UE en matière d’ententes et d’abus de position dominante :
- Lier son service de petites annonces en ligne Facebook Marketplace à son réseau social personnel Facebook.
- Imposer unilatéralement des conditions commerciales inéquitables à d’autres fournisseurs de services de petites annonces en ligne qui font de la publicité sur les plateformes de Meta, en particulier sur ses réseaux sociaux très populaires Facebook et Instagram.
La Commission a ordonné à Meta de mettre effectivement fin à ce comportement et de s’abstenir de répéter l’infraction ou d’adopter à l’avenir des pratiques ayant un objet ou un effet équivalent.
CYBERSÉCURITE
- L’UE et le Japon explorent les possibilités de coopération en matière de cybersécurité
Le sixième dialogue sur la cybersécurité entre le Japon, hôte, et l’UE s’est déroulé peu après l’annonce le 1er novembre dernier du partenariat de sécurité et de défense UE-Japon, dans le cadre du dialogue stratégique entre les deux parties pour raviver des échanges qui peinent à emprunter de nouvelles voies et explorer de nouveaux domaines, comme si le poids de la complexité lestait toutes ces initiatives.
Pourtant, en 2019, l’accord de partenariat économique UE-Japon est le plus abouti au monde : son entrée en vigueur supprime 99 % des droits de douane de l’UE sur les exportations japonaises vers l’UE et 97 % des droits de douane japonais sur les exportations de l’UE vers le Japon. Malgré ce remarquable travail qui prit des années, en 2021, le Japon ne représentait que 2,9 % des exportations de l’UE (8,8 % vers la Chine) et les importations en provenance du Japon – 3 % du total de l’UE (20 % en provenance de la Chine).
Nous en oublierions presque que le Japon a été jusqu’à la fin des années 90 plus que le premier partenaire commercial de l’UE, son pire cauchemar industriel, la dominant dans l’innovation, la qualité et tous les aspects de la conception, fabrication et commercialisation d’innombrables secteurs de la technologie, de l’automobile à la mécanique, l’électronique, la communication et les centaines d’appareils jamais vus auparavant. Pourtant, à peine dix ans plus tard, le Japon sombra à son tour dans la stagflation et la morosité, entre déclin démographique et impossibilité à convertir sa puissance économique en pouvoir et, surtout, en sécurité. Une brutale réalité qui s’est réaffirmée le 5 novembre à l’Union européenne puissance, entre Donald Trump et Vladimir Poutine.
C’est un autre rapprochement qui s’opère à présent : dans une déclaration conjointe, le Japon et l’Union européenne s’investissent partenaires clés dans les domaines de la paix, de la sécurité et de la défense dans la région indopacifique, dans lesquels ils ont considérablement renforcé leurs relations… Même si le dialogue UE-Japon était suivi par la semaine UE-Japon-États-Unis sur la cybersécurité des systèmes de contrôle industriel (ICS) pour la région indopacifique 2024.
Dans le cadre de leur dialogue stratégique, la cybersécurité fait partie de ces « défis sans précédent pour la paix et la stabilité » qui les ont conduits à ce nouvel exercice, dans lequel ils explorent les possibilités de coopérations futures pour la sécurité et la résilience des produits et la protection des infrastructures critiques ou encore les approches et les actions de renforcement des capacités en matière de cybersécurité.
- La Commission et les pays de l’UE simulent des cyberattaques à grande échelle afin d’améliorer l’état de préparation
Des hauts fonctionnaires de cybersécurité des États membres de l’UE et de la Commission ont participé à cet exercice annuel (‘Blue OLEx’ pour les connaisseurs), afin de tester la préparation de l’UE en cas de crise liée au cyberespace. Cette année, l’exercice a été dirigé par les autorités italiennes, avec le soutien de l’Agence de l’Union européenne pour la cybersécurité (ENISA) et s’est concentré sur la coopération au niveau exécutif, notamment par l’intermédiaire du réseau d’organisations de liaison en cas de crise informatique (« EU-CyCLONe » pour les intimes), mis en place à la suite de la mise en œuvre de la directive sur la sécurité des réseaux et des systèmes d’information (directive SRI 2) de décembre 2022.
L’exercice aidera les leaders en cybersécurité à identifier les domaines à améliorer dans la manière standardisée de réagir aux incidents et aux crises. EU-CyCLONe a pour objectif de contribuer à la gestion des incidents et crises informatiques majeurs au niveau opérationnel. Il complète les structures existantes en matière de cybersécurité au niveau de l’UE en établissant des liens entre la coopération au niveau technique, comme l’équipe de réponse aux incidents de sécurité informatique (CSIRT), et les niveaux politiques, tels que le dispositif intégré pour une réaction au niveau politique dans les situations de crise (IPCR).
Les résultats obtenus au cours de l’exercice contribueront à l’évaluation du plan de réaction coordonnée aux incidents et crises de cybersécurité majeurs, adopté en 2017 pour répondre à trois lacunes persistantes malgré l’adoption d’un cadre législatif et règlementaire tardif mais complet : 1) un véritable manque de stratégie globale du cyberespace à l’échelle européenne ; 2) une dispersion des acteurs avec une concurrence entre les différentes directions générales pour le pilotage des enjeux de cybersécurité au sein de l’Union ; 3) un manque d’efficacité… que ces exercices de simulation corrigent plus rapidement que l’adoption de nouveaux textes, en mettant l’accent sur la pratique -plutôt que sur les principes- de la coopération.
EUROPEAN MEDIA FREEDOM ACT / AUDIOVISUEL / DROITS D’AUTEUR
- Entrée en vigueur du droit des citoyens européens d’accéder à une pluralité de sources journalistiques fiables – L’Acte pour la liberté des médias reconnait en son article 3L e droit des citoyens d’avoir accès à une pluralité de sources journalistiques fiables, reconnu à, est entré en vigueur ce vendredi 8 novembre. L’organisation Reporters sans frontières a qualifié cette étape d’« avancée historique », appelant à une mise en œuvre intégrale de l’acte dans l’Union européenne. « À l’heure où la désinformation et l’ingérence étrangère malveillante prolifèrent dans l’UE, ce nouveau droit (…) fournit une base juridique aux mesures concrètes qui doivent désormais être prises par les États membres de l’UE afin de préserver l’intégrité des espaces d’information démocratiques », a-t-elle ajouté, citant « la protection de la confidentialité des sources, les garanties de l’indépendance éditoriale et les mesures visant à encourager le pluralisme externe » ainsi que la garantie pour les citoyens d’accéder à une information fiable, « quel que soit le support utilisé ».
NUMERIQUE
Le sommet des présidents de DigitalEurope s’est tenu à Varsovie en amont de la présidence polonaise de l’UE
Le réseau européen de 41 associations numériques a échangé avec la prochaine présidence polonaise du Conseil de l’UE après une présentation par le ministre Krzysztof Gawkowski et le secrétaire d’État Dariusz Standerski de leurs priorités en matière de technologie pendant leur mandat :
- La Pologne étant l’un des pays d’Europe où les cyberattaques sont les plus nombreuses, la promotion d’une cybersécurité paneuropéenne sera au cœur de leurs préoccupations ;
- La loi sur l’IA entrera dans une nouvelle phase en 2025 et la présidence polonaise veut s’assurer que sa mise en œuvre se fera sans heurts dans toute l’UE
- La compétitivité étant la priorité industrielle de l’UE, la présidence polonaise souhaite réduire la charge administrative à laquelle les entreprises innovantes sont confrontées aujourd’hui.
Le lobby a saisi l’occasion de son sommet pour saluer les auditions des vice-présidents exécutifs désignés qui seront les plus impliqués dans la politique européenne du Numérique, Henna Virkkunen et Stéphane Séjourné, dont il partage les principales orientations pour la mandature, à une nuance près : « Avons-nous vraiment besoin d’une autre stratégie d’union des données ? Nous devrions également nous assurer que la nouvelle loi sur l’IA est correctement mise en œuvre, il n’est pas nécessaire d’ajouter une complexité supplémentaire avec plus de règles sur l’IA, pas de directive sectorielle ni de directive sur la responsabilité en matière d’IA, tout cela est couvert par la réglementation existante. »
A l’issue de son Sommet, l’association a mis en ligne une nouvelle brochure appelant à réviser le système « complexe et obsolète » des redevances de droit d’auteur appliqué à la plupart des appareils électroniques. Elle propose « une exploration collaborative de solutions plus justes et plus efficaces », qui pourraient inclure :
- Le modèle du budget de l’État : Suivant l’exemple de la Finlande, les taxes sur les appareils pourraient être remplacées par un fonds d’État géré par un conseil consultatif, ce qui garantirait une compensation équitable tout en réduisant les coûts administratifs.
- Le modèle de licence directe : L’exemption pour copie privée pourrait être abolie en faveur de paiements directs par copie, soutenus par la technologie blockchain pour la transparence et la réduction de l’utilisation non autorisée.
- Une contribution culturelle par ménage/foyer fiscal : Les contributions pourraient être liées à l’utilisation potentielle des appareils par foyer fiscal plutôt qu’à la propriété individuelle, ce qui en simplifierait l’administration et permettrait de définir des exemptions pour les situations de précarité.
- Une redevance sur les œuvres culturelles au point de vente : Le financement pourrait être aligné sur la consommation de contenus protégés par le droit d’auteur, ce qui garantirait des contributions proportionnelles.
AGENDA DE LA SEMAINE PROCHAINE
Parlement européen : auditions des commissaires désignés
- Lundi 18 novembre : commission JURI
- Jeudi 21 novembre : la Conférence des Présidents du Parlement européen décide si oui ou non clôturer les auditions et d’inscrire le vote sur le Collège dans l’ordre du jour de la plénière.
Conseil de l’UE :
- Jeudi 21 novembre : première réunion « droit d’auteur » du code de bonnes pratiques
- Lundi 18 – Mercredi 20 novembre : Horizontal Working Party on Cyber Issues
Commission européenne :
- Vendredi 15 novembre : réunion finale sur le rapport conclusif sur l’accès aux données par les forces de l’ordre
AUDITION DES COMMISSAIRES DESIGNES AU PARLEMENT EUROPEEN
Rappel des règles d’une procédure d’audition que les traités ne prévoient pas.
La Conférence des présidents organise les auditions en se fondant sur la recommandation de la Conférence des présidents des commissions parlementaires. Le président et les coordinateurs de chaque commission sont chargés d’en définir les modalités. Les auditions sont publiques et sont retransmises en direct. Le Parlement évalue la compétence générale, l’engagement européen et l’indépendance personnelle des commissaires désignés. Il évalue leur connaissance du portefeuille qui doit leur être confié et leurs capacités en matière de communication tout en tenant compte de l’équilibre entre les hommes et les femmes. Le Parlement peut également formuler des commentaires sur les responsabilités relevant du portefeuille attribué aux commissaires désignés.
L’approbation des commissaires désignés à la suite de leur audition
Le président et les coordinateurs des groupes politiques de la commission parlementaire compétente (ou des commissions conjointes si le portefeuille du commissaire désigné relève à égalité de la compétence de plusieurs commissions) se réunissent à huis clos immédiatement après l’audition. Ils échangent leurs avis pour décider celui qui sera repris dans la lettre d’évaluation de la commission parlementaire (ou de celles qui sont conjointes). La lettre intègre aussi les avis des commissions invitées (si le portefeuille relève dans une mesure substantielle de leur compétence). Chaque commissaire désigné fait l’objet d’une seule lettre d’évaluation.
Ces lettres doivent être transmises dans un délai de 24 heures après la fin de l’évaluation. Elles sont examinées par la Conférence des présidents des commissions parlementaires, puis envoyées à la Conférence des présidents. C’est elle qui déclare les auditions closes et autorise la publication des lettres d’évaluation.
Avis favorable ou défavorable : unanimité ou majorité des deux tiers
Si les coordinateurs approuvent ou rejettent à l’unanimité le commissaire désigné, une lettre d’approbation ou de rejet est rédigée. Si l’approbation est obtenue à la majorité des deux tiers, la lettre mentionne cette large majorité et, si nécessaire, les avis minoritaires.
En cas d’absence de majorité des deux tiers
Les coordinateurs demandent des informations complémentaires au commissaire désigné via des questions écrites. Si la majorité des deux tiers n’est toujours pas atteinte, ils peuvent demander une audition supplémentaire d’une heure et demie, sous réserve de l’approbation de la Conférence des présidents.
Si l’accord n’est toujours pas obtenu, le président convoque une réunion des membres de la commission parlementaire compétente au fond (idem pour chaque commission conjointe). Deux votes sont organisés, le premier sur l’aptitude du candidat à devenir membre de la Commission, le second sur sa capacité à gérer les missions qui lui seront confiées. Le résultat des votes motivera l’avis défavorable de la commission parlementaire (ou conjointe). Cette motivation permet d’orienter le/la président.e désigné.e de la Commission européenne vers la bonne solution pour débloquer la situation, soit par l’attribution d’un nouveau portefeuille ou le changement du/de la candidat.e.
En cas d’avis négatif signifiant un rejet du candidat désigné
Le Parlement n’a pas, dans les traités, le pouvoir de demander à un État membre de désigner un nouveau candidat : seul le gouvernement concerné peut le faire, après avoir retiré la candidature de son premier choix. Le/la président.e désigné.e de la Commission européenne ne peut pas non plus le lui imposer : tout refus d’un pays d’y donner suite bloque en pratique la procédure de confirmation puisque en plénière, le Parlement doit confirmer la composition du Collège en bloc et dans sa totalité. En cas de blocage du processus par un État membre, c’est dans le cadre d’une négociation à huis-clos au sein du Conseil européen que les Chefs d’État et de gouvernements chercheraient une solution pour que la procédure de confirmation puisse reprendre.
Calendrier de l’après auditions
- 21 novembre : la Conférence des Présidents du Parlement européen décide de clôturer ou non les auditions et d’inscrire le vote sur le Collège dans l’ordre du jour de la plénière du 25 au 28 novembre, à Strasbourg.
- 1er décembre : la nouvelle Commission européenne prend officiellement ses fonctions.
- Si des avis défavorables ralentissaient la procédure au-delà de novembre, la Conférence des présidents du 12 décembre pourrait inscrire le vote à l’agenda de la plénière du 12 au 19 décembre pour permettra à la nouvelles Commission de prendre ses fonctions au 1er janvier 2025 (et ainsi de suite chaque mois le temps que dureraient les blocages).
La Commission complète doit être élue à la majorité simple des voix exprimées en plénière, lors d’un vote nominal (ce qui signifie que le vote individuel de chaque député est enregistré et publié en annexe aux procès-verbaux, sauf si le vote à bulletin secret a été demandé). |
*****************************
Le parlement européen termine dix jours d’audition des commissaires désignés mais ne donne son approbation à aucun des six vice-présidents exécutifs d’Ursula von der Leyen.
Alors que les commissions parlementaires ont rendu leur avis après la prestation de chaque commissaire désigné la semaine dernière, les auditions des six vice-présidents-exécutifs se sont soldées mardi soir tard par la décision de ne rien décider. Ce fut la seule surprise d’une longue journée d’exercices tellement préparés qu’ils ont pris des airs de programme court dans les épreuves de patinage artistique, lorsque les concurrents doivent obligatoirement réaliser huit figures imposées et sont priés d’y mettre le moins possible d’expression personnelle.
De fait, aucune prestation des candidats aux postes de vice-président exécutif ne fut ratée et c’est bien ce qui a fini par poser un problème aux députés européens : comment exercer leur pouvoir si tous les candidats sont approuvés ? Et comment transformer cet exercice du pouvoir en influence si vous n’avez rien pour justifier un grand marchandage ? « En l’assumant » semble avoir été la réponse des chefs des groupes politiques, qui ont justifié d’une même voix la décision de ne donner aucun avis sur les prestations individuelles des vices-présidents-exécutifs par la nécessité de lier le sort de chacun des 26 candidats à celui de tout le collège des commissaires.
Derrière ce rebondissement, la majorité pro-européenne traditionnellement formée par le Parti Populaire Européen (PPE), les Socialistes et Démocrates du groupe S&D et les Libéraux et Centristes de RE, est en crise :
- Le PPE a refusé de soutenir la socialiste espagnole Teresa Ribera comme vice-présidente de la Commission – c’était une exigence des députés espagnols du Parti Populaire –, déclenchant des tensions avec les Socialistes et Renew, qui ont annoncé en réponse qu’ils ne soutiendraient pas Raffaele Fitto, candidat vice-président italien, ni Oliver Varhelyi, le commissaire désigné à la sante et au bien-etre animal, proposé par Viktor Orban (Hongrie).
- Le PPE tente de résoudre la situation en conditionnant son soutien à Ribera à l’approbation par les Socialistes et les Libéraux d’un « paquet » incluant Fitto et Varhelyi. Cependant, les Socialistes et les Libéraux restent très divisés sur Varhelyi.
Prochaines étapes :
- 20 novembre 2024 : la conférence des présidents du Parlement européen tiendra un échange de vues sur l’inscription du vote du collège à l’ordre du jour de la session plénière ;
- 27 novembre 2024 : S’il n’y a pas d’autres complications, le vote de confirmation de la Commission européenne devrait avoir lieu le mercredi 27 novembre à midi pour un début de mandat le 2 décembre.
Candidats commissaires et leurs directions générales respectives
Structure de la nouvelle Commission européenne
Aspects clés de la nouvelle structure
« Tous les commissaires doivent travailler ensemble. Dans cet esprit, chaque vice-président exécutif aura également un portefeuille sur lequel se concentrer – pour lequel ils devront collaborer avec d’autres commissaires. Car ce qui affecte la sécurité affecte la démocratie, ce qui affecte l’économie affecte la société, et ce qui affecte le climat et l’environnement affecte également les personnes et les entreprises » – Ursula von der Leyen.
Fin de la gestion en silos des politiques : Jusqu’ici, les commissaires recevaient chacun des attributions bien définies de façon à éviter les querelles de compétence et les polémiques partisanes ou nationalistes sur des arbitrages. Cette pratique a incité commissaires, cabinets et directions générales (DG) à gérer les politiques de manière compartimentée et verticale, la « consultation interservices » encadrant les échanges et apports entre DG. La nouvelle structure doit favoriser la coproduction des initiatives pour intégrer les considérations transversales dans l’écriture et l’adoption des propositions. C’était une recommandation du rapport Draghi.
Priorités de la nouvelle Commission : L’organisation et les intitulés des portefeuilles montrent que la compétitivité et la sécurité viennent s’ajouter à la priorité donnée durant le précédent mandat à la double transition climatique et numérique. En filigrane, le parachèvement du marché intérieur (incluant énergie, télécoms, finance, défense) et la mise en œuvre du rapport Draghi sont des enjeux cruciaux dont on retrouve des éléments dans tous les portefeuilles – au risque de ne pas toujours les rendre très lisibles.
Répartition stratégique des portefeuilles : Ursula von der Leyen a confié les portefeuilles économiques et industriels les plus importants à des commissaires qui ne sont pas affiliés au PPE et issus de pays interventionnistes (France, Espagne, Italie), favorables à davantage de dépenses communes et à une politique industrielle plus active.
Changement de paradigme en matière de concurrence : La nouvelle Commission semble vouloir soutenir des champions européens capables de concurrencer les entreprises américaines et chinoises, en privilégiant des initiatives et politiques à destination des producteurs d’abord, celles en faveur des consommateurs passant au second plan.
Nouvelle organisation des responsabilités : Constatant un « recoupement stratégique » entre plusieurs domaines et compétences, Ursula von der Leyen a distribué des responsabilités hétérogènes aux commissaires, obligeant ceux dont les domaines se chevauchent à travailler ensemble. Cela vise à éviter les initiatives contradictoires et à encourager une meilleure coordination, sur le modèle du Pacte Vert européen.
Position renforcée d’Ursula von der Leyen : Cette nouvelle organisation complexe des responsabilités permet à la présidente de prendre l’initiative sur les politiques de son choix et la place au-dessus de la mêlée « transversale », qu’elle domine en renforçant son rôle d’arbitre et son contrôle sur le collège.
Lettres de mission de chaque commissaire : elles reprennent l’appel à la collaboration entre les commissaires, les enjeux qui le justifie, les ambitions et la voie à suivre pour les atteindre en cinq ans en faisant largement référence aux conclusions et recommandations du rapport Draghi sur l’avenir de la compétitivité européenne et au rapport Letta sur l’avenir du marché unique. Le numérique reste un sujet phare dans les priorités règlementaires, avec l’annonce du « Digital Fairness Act ». En revanche, les droits de propriété intellectuelle, dispersés dans différents portefeuilles, sont mentionnés en lien avec le paquet « produits » ou le numérique mais sans vision transversale ni suivi politique.
AUDITION DES COMMISSAIRES DESIGNES – EXTRAITS, ANALYSES
Retours sur les déclarations d’Henna Virkkunen, vice-Présidente exécutive désignée à la souveraineté technologique, la sécurité et la démocratie
Si elle a su se montrer claire dans la majorité de ses réponses, elle n’a cependant pas traité en profondeur beaucoup de dossiers litigieux, offrant une vision globale aux parlementaires plutôt qu’un agenda d’actions législatives détaillées. Henna Virkkunen a aussi habilement esquivé plusieurs questions sur la manière de gérer les relations entre les États-Unis et l’Europe, particulièrement dans le domaine du numérique et de l’innovation, sans parler de X, de son contenu et de son propriétaire très critiqué. « C’est un moment crucial pour l’Union européenne », a-t-elle asséné en guise d’introduction. « Soit les évènements extérieurs nous façonnent, soit nous sommes forts et nous nous développons nous-mêmes. Il faut nous assurer que l’Union soit résiliente dans chaque situation et travailler avec les pays qui partagent nos valeurs ».
De l’importance du DSA. La commissaire désignée s’est montrée très attachée au règlement sur les services numériques (DSA), arguant à plusieurs reprises de son importance fondamentale dans l’arsenal européen de régulation des grandes plateformes, éclipsant totalement son parent proche, le DMA (règlement sur les SMA numériques). Henna Virkkunen a déclaré que l’application du DSA serait « l’une des plus grandes priorités » et qu’elle s’engageait à examiner « l’autre côté » des réseaux sociaux, en s’attaquant à la fois aux contenus préjudiciables et au temps passé par les enfants en ligne.
Interrogée sur le commerce électronique et sur son intention de prendre des mesures supplémentaires pour contrôler les plateformes en ligne, telles que Temu ou Shein qui sont déjà dans le viseur de la Commission, la commissaire désignée a insisté sur la nécessité d’avoir des « règles du jeu équitables ». « Nous devons prendre des mesures dans de nombreux domaines pour faire face à l’afflux de dix millions de colis chaque jour », a-t-elle affirmé, sans pour autant donner plus de détails sur lesdites mesures. Christel Schaldemose (S&D, danoise) a interrogé la commissaire désignée sur les effectifs de l’équipe chargée d’appliquer les règles de modération des contenus du DSA. Ceux-ci, comprenant actuellement 100 personnes, « devraient doubler d’ici la fin de l’année prochaine », a promis Mme Virkkunen.
Le cas sensible de l’influence américaine. L’actualité aidant, plusieurs députés ont interrogé la commissaire désignée au sujet de la dépendance européenne vis-à-vis des États-Unis, particulièrement en matière de sécurité et d’innovation. Interrogée par Laura Ballarín Cereza (S&D, espagnole) sur sa volonté « d’affronter la prochaine administration américaine dans sa lutte pour rendre les plateformes en ligne plus sûres », Henna Virkkunen a répété que les États-Unis étaient le « partenaire commercial et sécuritaire le plus important de l’Union européenne » et que les règles de l’UE s’appliquaient à toutes les plateformes, même si celles-ci sont basées en dehors de l’Union. Cependant, la Finlandaise a esquivé la question des travers de la plateforme X et de la procédure formelle ouverte à son encontre.
Supprimer les obstacles inutiles. La nécessité de réduire la bureaucratie a été maintes fois réaffirmée par la commissaire désignée. « Il faut supprimer les chevauchements, rendre la mise en conformité plus simple, se servir de l’IA et de la numérisation », a-t-elle déclaré. En réponse à Svenja Hahn (Renew Europe, allemande), qui fustigeait son manque de précision, elle a mentionné le « portefeuille numérique européen » des entreprises, pour faciliter le travail administratif en Europe.
Augmenter les investissements. Beaucoup des réponses formulées par la commissaire désignée étaient centrées sur la nécessité pour l’UE de relancer ses investissements et stimuler l’innovation, comme préconisé par les rapports ‘Draghi’ et ‘Letta’. La Finlandaise, comme beaucoup avant elle ces derniers mois, a souligné les fortes dépendances technologiques de l’Europe à l’égard d’autres pays, comme les États-Unis et la Chine, particulièrement pour des technologies essentielles telles que les services informatiques dématérialisés (‘cloud‘) et les puces électroniques. « 80% de notre technologie provient de l’extérieur de l’UE », a-t-elle indiqué. L’ancienne eurodéputée a cependant esquivé une question sur la certification européenne du ‘cloud’ (EUCS), dans les limbes des négociations européennes depuis déjà de très longs mois.
L’Europe comme continent de l’IA. La Finlandaise a estimé que les règles de l’UE en matière d’IA, notamment l »Acte sur l’intelligence artificielle’, doivent être « rapidement mises en œuvre pour faciliter les choses ». La législation européenne sur le développement du ‘cloud’ et de l’IA (‘EU Cloud and AI Development Act’) doit aider les petites entreprises à sécuriser l’accès aux services d’IA avancés et, donc, améliorer la compétitivité européenne, a déclaré Mme Virkkunen. Selon elle, il faut « repartir de zéro » sur de nombreux domaines, « éviter les frictions entre États membres et investir de façon massive ». Elle a mentionné plusieurs secteurs, en plus de l’IA, où l’Europe est « à la traîne »: services de ‘cloud‘, semi-conducteurs, formation d’une main-d’œuvre compétente…
Retours sur les déclarations de Teresa Ribera, vice-Présidente exécutive désignée à la Transition propre, juste et compétitive
Teresa Ribera a été bousculée sur de nombreux sujets mais l’audition a surtout été marquée par les tensions entretenues par les députés européens espagnols dans l’opposition au gouvernement de Pedro Sanchez, à la suite des critiques sur sa gestion de la catastrophe naturelle qui a endeuillé Valencia et plusieurs autres villes de la côté espagnole. Dans un Parlement obnubilé par des questions de politiques nationales, elle a eu peu de place pour entrer dans le fond des sujets.
Politique de concurrence : Dans son propos liminaire, elle s’est contentée de défendre « une politique rigoureuse », une « simplification des processus » et une collaboration avec Henna Virkkunen pour une approche « ferme sur les marchés numériques ».
Elle a été pour le moins succincte lorsqu’elle a été interrogée sur les réformes des réglementations en matière de concurrence, indiquant par exemple que les règles relatives aux aides d’État devaient évoluer pour suivre la transition verte de l’Union européenne. Bien qu’elle ait évoqué une nouvelle approche de la politique de concurrence, au fond elle ne s’est engagée qu’à œuvrer à une réforme sur la rapidité de son application et sur sa simplification. Sur les acquisitions prédatrices, sujet qu’affectionnent plusieurs députés européens à gauche comme à droite, elle a évoqué des « lignes directrices » pour ne pas empêcher l’innovation. C’est peu dire que les députés n’ont pas été assommés de détails : interrogée sur ses pistes pour améliorer l’application du DMA, elle répond que la Commission devrait être davantage habilitée à mieux faire appliquer la législation sur les marchés numériques. CQFD… mais pas entièrement convaincant venant de la vice-présidente exécutive qui aura la charge de la mise en œuvre complète du DMA, de la modernisation de la politique de concurrence et de la lutte contre les acquisitions prédatrices.
« J’ai eu sur les sujets tech l’impression d’avoir assisté à l’audition de la commissaire à la Transition écologique, or la lutte contre les pratiques déloyales des Big Tech doit rester en haut de l’agenda », a commenté la députée Stéphanie Yon-Courtin (RE, FR) après avoir assisté à l’audition : c’est un résumé plutôt fidèle d’un exercice durant lequel les thématiques de concurrence dans la tech sont tout simplement restées sous les radars.
Une transition propre et juste : Mme Ribera a appelé à soutenir la décarbonation de l’industrie, à promouvoir une transition juste, notamment en matière de logement et pour des emplois de qualité, et à tirer parti des avantages des transitions écologique et numérique. Plus convaincante et dans son élément sur cette partie de son portefeuille, elle n’a toutefois pas livré une vision de son rôle, s’en tenant à sa lettre de mission, à bien des égards plus complète que son intervention.
Elle n’a par exemple apporté aucune précision sur ce que serait le Pacte pour une industrie propre, l’initiative phare des 100 premiers jours de la nouvelle Commission européenne. Interrogée plusieurs fois sur le rôle et le soutien européen à l’énergie nucléaire dans mix énergétique propre et durable, elle a réussi à esquiver les questions sur le financement du développement de l’énergie nucléaire par l’UE et invariablement répondu que les décisions en matière de mix énergétique relevaient de la compétence des États membres.
Sur la situation de l’industrie automobile et les objectifs de décarbonation du secteur, la candidate a exprimé sa volonté de travailler avec diverses parties prenantes de l’industrie pour « veiller à ce que la transition soit réalisée » et s’est engagée à aborder la question du soutien aux sous-traitants de l’industrie automobile : c’était peut-être la seule annonce nouvelle de cette audition durant laquelle Mme Ribera a essuyé une salve de critiques et d’attaques sur la responsabilité du gouvernement espagnol dans les défaillances de la chaîne de décision de l’état d’alerte, qui ont aggravé le terrible bilan des inondations à Valencia et dans les régions dévastées par la catastrophe naturelle.
L’obstination de certains députés du Parti populaire et de Vox à vouloir relier la nomination de Mme Ribera à la gestion de ce drame a tourné au règlement de compte politique, ne servant ni l’évaluation de la candidate, ni l’image des députés qui ont choisi de jouer cette partition plutôt indécente. Mme Ribera a fait preuve d’une grande maîtrise en ne cédant ni à la polémique, ni à la surenchère ou à l’énervement, gagnant l’admiration de son groupe et, plus important, le soutien de Renew Europe, indigné par la récupération politique de cette audition.
De fait, l’audition est passée à côté de la question centrale au portefeuille de Mme Ribera : quelle évidence a bien pu justifier aux yeux de la présidente von der Leyen que la vice-présidente exécutive à la transition propre ait sous sa responsabilité la direction générale de la concurrence (DG COMP) alors que sa politique relève des DG ENV et CLIMA ? Quelle sera l’efficacité de l’action de Mme Ribera avec ce portefeuille hybride ?
Retour sur l’audition de Stéphane Séjourné, vice-président exécutif désigné à la Prospérité et à la Stratégie industrielle
Stéphane Séjourné a livré une prestation à son image : lisse, propre, maîtrisée et professionnelle, se montrant aussi incollable qu’incolore à force de dérouler son programme tel qu’il lui a été confié par Ursula von der Leyen dans la lettre de mission qu’elle lui a adressée – au risque d’être parfois un peu long comme la lecture de la liste des ingrédients d’un plat industriel qu’on s’apprêtait à acheter avant de s’en décourager devant une composition manquant de naturel – mais ce n’était pas entièrement son cas, puisqu’il est resté souriant et plutôt détendu face à des députés dont il connaît bien le mode d’emploi après avoir présidé le groupe Renew Europe sous la précédente mandature.
Pacte pour une industrie propre : Dans sa déclaration liminaire devant les commissions de l’industrie, de la recherche et de l’énergie ; du marché intérieur et de la protection des consommateurs ; de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire, et des affaires économiques et monétaires, M. Séjourné a annoncé le futur Pacte pour une industrie propre (« Clean Industrial Deal ») afin de poser les bases “d’une politique industrielle adaptée à notre époque”, et a ajouté que l’UE devrait se décarboner et se réindustrialiser simultanément. Non, ce n’est pas Mme Ribera qui parle mais bien celui dont le portefeuille recoupe celui de la vice-présidente à la Transition propre. Il n’a toutefois pas plus qu’elle précisé le contenu du Pacte, préconisant de se concentrer sur les secteurs stratégiques ayant un potentiel et un impact socio-économique plus importants, de faire baisser les prix de l’énergie et de développer des marchés florissants pour des produits comme les véhicules électriques et les pompes à chaleur.
Investissements : Pour combler le déficit d’investissement de 800 milliards d’euros par an mentionné dans le rapport Draghi, il a d’abord confirmé que des investissements considérables étaient nécessaires pour que les entreprises les plus innovantes ne quittent pas l’UE et proposé la mise en place d’un Fonds européen pour la compétitivité et l’utilisation du fonds InvestEU pour augmenter les financements publics et les synergies entre les investissements publics et privés.
Marchés publics et simplification : Toujours plus politique que technique, quand il déclare que « ce mandat sera celui de la simplification » ou loue les vertus d’un allègement des procédures, il a annoncé un « acte de simplification » pour les marchés publics, dont la complexité freine l’accès des PME et les critères ne mettent pas assez en avant la durabilité ou la qualité. Il souhaite proposer « probablement début 2026 », après une consultation début 2025, sa future réforme du cadre législatif sur les marchés publics, il entend qu’elle permette de « privilégier les produits européens dans un certain nombre de secteurs stratégiques » qui restent à déterminer même s’il a indiqué avoir « commencé à donner un certain nombre de grilles de lecture sur les industries d’avant et les industries futures ». Il a également promis de réduire la charge administrative des entreprises et proposé l’introduction d’un passeport PME pour leur éviter de devoir justifier en permanence leur statut juridique.
IA : cette « technologie d’avenir » est revenue plusieurs fois dans des questions et des réponses du candidat, qui a exprimé son intention de travailler à un « cadre juridique » pour favoriser l’« intégration de l’IA dans les processus de production » des entreprises européennes, le rôle des marchés publics pour soutenir l’émergence de nouveaux marchés, et une « réflexion » sur un projet important d’intérêt européen commun (Piiec) consacré à l’IA, dont il faut augmenter l’offre en Europe.
Soutien aux industries sidérurgique, automobile et aéronautique : Interrogé à plusieurs reprises sur les politiques sectorielles, il est resté prudent, évoquant un soutien prolongé de la Banque européenne d’investissement à l’industrie sidérurgique ou s’engageant à agir du côté de la demande pour aider les constructeurs automobiles à atteindre leurs objectifs. Sur un éventuel soutien à l’industrie aéronautique, il a renvoyé le secteur au Pacte pour une industrie propre qui le concernera.
Propriété intellectuelle : Dans ce domaine quasi invisible de l’audition, les questions sur la protection des entreprises européennes contre la concurrence déloyale et sur celle des consommateurs européens contre les produits de qualité inférieure fabriqués dans des pays tiers, Stéphane Séjourné a souligné la nécessité de finaliser la réforme douanière qui permettra d’instituer de véritables contrôles aux frontières européennes.
Retour sur l’audition de Valdis Dombrovskis, commissaire désigné au portefeuille de l’économie, de la productivité, de la mise en œuvre et de la simplification.
Le futur ex-vice-président exécutif de l’actuel collège des commissaires perd ce titre mais conserve un portefeuille important, Ursula von der Leyen lui confiant un double rôle articulé autour de l’économie d’une part, et de la simplification règlementaire et administrative d’autre part.
Économie et investissements : Dans son discours introductif, M. Dombrovskis s’est engagé à œuvrer pour améliorer la cohérence, l’équité sociale et la cohésion au cœur du modèle économique européen. L’architecte des nouvelles règles de gouvernance économique, qu’il a réussi à faire approuver par les Chefs d’État et de gouvernement sous la précédente mandature, a défendu son bilan, estimant les règles adaptées à leur objectif et qu’il s’assurerait qu’elles sont bien appliquées ‘‘de manière crédible et impartiale’’ et que l’euro devait devenir une force plus importante sur la scène mondiale.
Les députés ont exprimé leur inquiétude quant à la possibilité d’un déficit d’investissement, notamment à la fin de la facilité pour la reprise et la résilience, et ont demandé un financement des investissements de l’UE par le biais de la dette commune de l’Union. Il a partagé leur préoccupation sur l’investissement sans s’engager une mesure particulière, comme celle revenue dans plusieurs questions sur la création d’un instrument spécifique pour financer l’Union de la défense
Simplification et mise en œuvre : A l’instar de Stéphane Séjourné, Valdis Dombrovskis a déclaré que l’UE avait besoin « de règles plus simples, plus faciles à mettre en œuvre » tout en assurant aux députés que les objectifs politiques ne seraient pas compromis. Il a proposé que toutes les règles existantes soient soumises à des tests de résistance et que leur impact sur la compétitivité et les PME soit dûment évalué, ce qui contribuerait à réduire les obligations de communication d’informations des entreprises d’au moins 25% (35% pour les PME). Pour réduire les formalités administratives des entreprises, le portefeuille numérique et l’identité électronique seront des instruments efficaces, le défi résidant dans leur mise en place à l’échelle de l’UE – défi que les outils existants, tels que le programme de soutien aux PME pour faire face aux coûts de mise en conformité, pourront aider à relever. Sur les rapports sur la durabilité, il a déclaré que l’UE devait éviter que les grandes entreprises ne transfèrent leurs obligations aux PME, un point que les tests de résistance pourraient contrôler.
Enfin, sans entrer lui non plus dans un luxe de détails, il a néanmoins dessiné dans son intervention les contours d’une petite révolution en évoquant une attention nouvelle de la Commission européenne pour la mise en œuvre de ses propositions, une source de difficultés qu’elle suivait jusqu’ici d’aussi près que les États membres l’y autorisaient – donc plutôt d’assez loin. Le commissaire désigné a ainsi annoncé : 1) le lancement d’un nouveau cadre de dialogues sur la mise en œuvre avec les entreprises concernées ; 2) qu’il utiliserait le levier des procédures d’infraction pour que les États membres mettent en œuvre les règles européennes convenues ; et 3) qu’il renouvèlera l’accord interinstitutionnel ‘‘Mieux légiférer’’ qui améliore les analyses d’impact et les évaluations des coûts en ne portant plus que sur les propositions législatives mais aussi l’application des législations.