17 novembre 2021
Accueil I #Actualités I JEAN-MARIE CAVADA : «LES PLATEFORMES ONT PRESQUE FAIT DU COLONIALISME DE CONTENUS» – Stratégies
L’ex-député européen et ancien PDG de Radio France dirige l’organisme de gestion collective DVP, ou Droits Voisins de la Presse. Chargée de négocier avec les plateformes, cette structure a pour objectif d’assurer une juste rémunération de la diffusion des contenus éditoriaux.
Vous avez présidé le premier conseil d’administration de Droits Voisins de la Presse (DVP), le 9 novembre 2021. Cet Organisme de gestion collective [OGC] veut obtenir des plateformes une rétribution en faveur des éditeurs de médias pour la diffusion de leurs contenus. Qui a d’ores et déjà rejoint votre organisation ?
Jean-Marie Cavada. Soixante quatorze éditeurs et agences de presse sont unis autour de DVP. Notre organisme rassemble aussi Radio France et France Télévisions, l’AFP, Prisma Media (Femme actuelle, Télé Loisirs, Capital, Voici) CMI France (Elle, Marianne, Télé 7 jours), Altice Media (BFMTV, RMC) Le Point, Le Canard enchaîné, L’Équipe, Mediapart et bien d’autres. Le syndicat des producteurs audio indépendants, le PIA, qui réunit des producteurs de podcasts, compte aussi nous rejoindre.
Qui est à l’origine de la création de la société DVP ?
Nos membres fondateurs sont le SEPM (syndicat des éditeurs de la presse magazine) qui compte plus d’un millier de titres et avait initié une première action en 2020. Avant d’être rejoint par la FNPS (Fédération nationale de la presse spécialisée), le Spiil (syndicat de la presse indépendante d’information en ligne) et le Geste (Groupement des éditeurs de contenus et de services en ligne).
Pourquoi créer cette structure maintenant ?
Lorsque j’étais vice-président de la commission des affaires juridiques du Parlement européen, j’ai été à l’initiative de la création d’une loi sur le droit d’auteur et les droits voisins. Son but économique et moral est de rétablir une égalité dans la répartition de la richesse entre les plateformes et la presse. En dix ans, la presse a vu 50 % de ses recettes publicitaires partir vers le digital. Or sur le numérique, les contenus de presse sont empruntés, souvent à vil prix, très souvent sans la moindre rémunération. C’est une machine à fabriquer de la famine pour la presse, et à la vider de ses moyens d’existence économique. Et il était nécessaire que l’Europe fasse une régulation, en raison des équilibres démocratiques et de la charte des droits fondamentaux.
Le combat a été difficile à mener face à Google et les autres Gafam ?
Il y a eu de terribles batailles… et des dizaines de millions d’euros déversés dans des cabinets de lobbying pour faire pression sur les exécutifs et les appareils législatifs des capitales européennes, sur la Commission européenne et sur le Parlement afin d’empêcher la création d’une législation qui diminuerait leurs recettes. Il a fallu sept à huit ans de travail pour faire adopter cette directive européenne en avril 2019.
Mais les plateformes n’ont toujours pas rétribué les médias. Pourquoi ?
La loi a été transposée dans le droit français en juillet, il y a deux ans, puis les décrets d’application ont été adoptés en octobre 2019. La presse a voulu se servir de la loi pour obtenir une juste réparation de la prédation qu’elle subissait. Le SEPM rejoint par la FNPS et le Spiil sont allés devant l’Autorité de la concurrence pour demander l’application de la loi. Sans que rien de productif n’émerge. Jusqu’en juillet 2021. Google a été condamné à verser une amende 500 millions d’euros avec 300 000 euros par jour d’astreinte.
Face à cette situation qui semble bloquée, la société DVP est créée. Pourquoi en assurez-vous la présidence ?
En juillet 2021, le SEPM m’a demandé de créer l’instance que j’avais préconisée lors des discussions à Bruxelles. J’y ai mis deux conditions. Créer un organisme qui regroupe le plus grand nombre de fournisseurs d’informations et pas seulement une catégorie de presse. Et que ces acteurs fassent preuve d’une forte capacité d’union. Nous avons rédigé les statuts et nous nous appuyons sur la Sacem.
La Sacem assurera la gestion de la DVP. Quel sera son apport concrètement ?
Nous aurons un contrat de prestation avec elle. Elle nous épaulera pour l’évaluation de la prédation et les négociations avec les plateformes, la collecte de l’argent et sa répartition. Le Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC) nous aidera aussi pour ce volet de répartition. Ces appuis nous permettront être un organisme ultra léger.
Évaluation, négociations, collecte ou répartition, quelle va être la mission la plus délicate ?
Elles le seront toutes, mais peut-être la qualité de l’évaluation. Elle nécessitera d’être indiscutable et incontestable par les plateformes.
Redoutez-vous des tensions entre mandataires ?
Nous verrons si l’intérêt général prime sur les intérêts particuliers. Nous sommes très vigilants pour que toutes les formes de presse soient prises en compte et des critères correctifs seront appliqués.
Comment comptez-vous percer le secret des données détenues par des plateformes dont la stratégie est fondée sur l’opacité ?
Jusque-là les évaluations se faisaient effectivement un peu au doigt mouillé. Nous voulons nous positionner comme le bras exécutif de la loi. Cela implique un renversement de méthode. Nous évaluerons le montant dû par chaque plateforme en fonction des audiences et entamerons les négociations, forts de ces éléments. François Claverie du Point sera à la manœuvre pour proposer des méthodes sur ce dossier. Il y a plusieurs moyens dont le recours à des cabinets spécialisés.
Vous avez prévu de réclamer votre dû à Facebook, Google et Microsoft. Avez-vous déjà entamé des discussions ?
Pas encore. Des négociations avec Google et le SEPM, la FNPS et le Spiil sont en cours. Nous prendrons la suite.
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