Jean-Marie Cavada demande à Thierry Breton de ne pas plier devant les opposants au droit d’auteur
2 juillet 2020
Jean-Marie Cavada demande à Thierry Breton de ne pas plier devant les opposants au droit d’auteur

2 juillet 2020

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Dans une lettre que nous publions, Jean-Marie Cavada demande à Thierry Breton de veiller à une application efficace de la directive droit d’auteur, et l’encourage à ne pas se laisser tenter par les arguments des opposants au texte, qui résulteraient dans un « préjudice irréparable » pour les auteurs et ayants droit.

Jean-Marie Cavada n’est plus au Parlement européen, mais – à travers son Institut – il continue de veiller à l’effectivité de la directive droit d’auteur, texte pour lequel il s’est battu pendant cinq ans. Dans ce cadre, il a étudié de près les arguments déployés par une quarantaine de députés menés par Marcel Kolaja (Parti Pirate, Tchéquie) dans une lettre envoyée à Thierry Breton début juin, que nous avions publiée. Rappelons que parmi les signataires de cette lettre figurent les Français Yannick Jadot, Michèle Rivasi, Yasmina Yenbou et Damien Carême, tous membres du groupe Les Verts. Cette semaine, Jean-Marie Cavada a écrit à Thierry Breton un courrier, que nous publions, dans lequel il répond point par point aux solutions proposées par ce groupe, solutions qui mèneraient, explique-t-il, à une réduction telle du champ d’application de l’article 17 qu’elle engendrerait un préjudice irréparable pour le monde de la création.

« Préjudice irréparable »

« Le système légal de l’article 17 démontre que le droit exclusif de l’auteur jouit d’une priorité de principe », affirme Jean-Marie Cavada dans sa lettre au commissaire. Il revient ensuite sur les arguments de Marcel Kolaja selon lesquels il faudrait, en substance, laisser l’accès libre aux oeuvres sur les plateformes, et ce par défaut. Sur ce point, Jean-Marie Cavada estime que « si l’on devait tolérer que l’œuvre reste accessible au public jusqu’au moment où l’ayant droit prouve le bien-fondé de son action, il en résulterait pour lui un préjudice irréparable. » Or l’objectif de l’article 17 de la directive droit d’auteur est bien d’éviter le préjudice financier que subissent les créateurs et ayants-droit quand leurs oeuvres sont diffusées sans autorisation et sans rémunération sur les plateformes. L’ancien député européen explique alors que la directive elle-même fournit un mécanisme garantissant que les oeuvres restent accessibles si elles bénéficient d’une exception au droit d’auteur : « l’article 17, paragraphe 7, vise à sauvegarder l’application des exceptions et limitations au droit d’auteur. L’article 17 paragraphe 9 oblige les fournisseurs à mettre en place un dispositif de traitement des plaintes et de recours rapide et efficace à la disposition des utilisateurs. »

« Pas de surveillance généralisée »

Jean-Marie Cavada s’attache ensuite à démonter point par point l’un des arguments centraux des députés anti article 17, à savoir que cette disposition entrainerait un filtrage généralisé d’Internet, filtrage interdit selon eux par la directive e-commerce. Cet argument, il le connait bien, puisque c’était l’un des raisonnements principaux des opposants au texte avant son adoption, parmi lesquels Julia Reda. « Je rappelle que le considérant 47 de la directive commerce électronique prévoit que l’interdiction de surveillance générale ne concerne pas les obligations de surveillance applicables à un cas spécifique », explique Jean-Marie Cavada. Il ajoute que le filtrage autorisé par la Directive droit d’auteur est d’ores et déjà utilisé dans certains pays, comme la France, sans poser de problèmes ni entrainer de plaintes : « l’expérience du filtrage des contenus protégés par un droit d’auteur tel qu’il est mis en œuvre en France dans le cadre de l’accord CNC/ALPA/YouTube tend à démontrer que le filtrage des contenus protégés par le droit d’auteur afin de bloquer ou retirer les œuvres non autorisées, ne conduit pas à une surveillance généralisée. Par ailleurs, l’ALPA chargé de la mise en œuvre de l’accord affirme avoir reçu peu de plaintes d’utilisateurs dont les contenus auraient été retirés par erreur. » Il conclut donc que « le régime de l’article 17 s’inscrit en conséquence dans le strict respect, tant de la directive 2000 (e-commerce) que de la directive 2001 (droit d’auteur) dont il ne modifie pas les équilibres, mais en même temps, l’article 17 restaure l’exercice du droit d’auteur dans le cadre du droit fondamental du droit de propriété. »

Jean-Marie Cavada, qui a évidemment suivi de près les déclarations de Thierry Breton sur les GAFAs, lui rappelle que la mise en place « d’une responsabilité spécifique dans le cadre du droit d’auteur crée un précédent considérable qui remet en cause le pouvoir déséquilibré dont disposent des GAFA, démontrant ainsi que des autorités politiques peuvent contraindre ces sociétés extraordinairement dérégulées à respecter certaines règles. »

Lettre de Jean-Marie Cavada à Thierry Breton – Article 17 de la directive droit d’auteur – courrier_JMCavada-à-TBreton_ART 17

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