11 avril 2022
Le DSA est actuellement en phase finale de négociations de Trilogue (l’étape au cours de laquelle les 3 institutions se mettent d’accord pour l’application de ce texte.
ART 14-3 – Le compromis proposé par la députée Mme SCHALDEMOSE nous convient. On aurait pu espérer un article 14 (article charnière du texte) plus fort, mais dans le cadre de négociations un peu tendues, l’INSTITUT SOUTIENT CE COMPROMIS.
ART 14-3 a) L’INSTITUT SE FELICITE DE SA SUPPRESSION. Malheureusement, ce qui était problématique dans cet article a été repris dans le considérant 41-a) par le Conseil. En revanche, la proposition du parlement est tout à fait acceptable.
CONSIDERANT 41-a)
La question reste entière : si un contenu est illégal, alors le principe de la liberté d’expression n’a pas vocation à être évoqué et ne jouera pas pour empêcher sa suppression.
- Soit le contenu est illégal et il doit être supprimé
- Soit le contenu est couvert par une exception au droit d’auteur motivée par la liberté d’expression et il est maintenu
La CJUE dans ses 3 arrêts de juillet 2019 a clairement indiqué que la liste des exceptions prévues à l’article 5 de la directive 2001/29 étaient limitatives et que le principe général de liberté d’expression, non consacré expressément par l’une des exceptions prévues par ledit article, ne pouvait être utilisé seul pour empêcher l’application du droit d’auteur
Cependant, l’Institut très conscient des enjeux des négociations, admet qu’il faille trouver un équilibre entre l’absolue nécessité du retrait d’un contenu illégal, et la protection de la liberté d’expression.
- PROPOSITION DE L’INSTITUT
[…] That it is clear that the content is illegal and that the decision to remove or disable access can only be taken after validation of the notification in order to respect the principle of freedom of expression and information
CONSIDERANT 26 – sur la subsidiarité
Nous attirons votre attention sur la 2e phrase (where possible…) qui laisse entendre qu’un principe de subsidiarité s’applique dans le cadre d’un dépôt de plainte contre un intermédiaire.
Sa rédaction suggère que les services intermédiaires ne devraient être impliqués que si cela est vraiment nécessaire. Il ne devrait pas exister un préalable d’un point de vue juridique pour intervenir auprès des intermédiaires techniques pour ne pas réduire l’efficacité des injonctions et ce d’autant plus que la France vient de retirer ce principe de la LCEN (loi de confiance dans l’économie numérique) et de le notifier à la Commission européenne.
Le principe même de la subsidiarité affaiblit toujours un texte européen et il est évident que le règlement doit rester exigeant. Dans un souci d’équilibre aux vues de l’objectif du DSA, l’Institut propose l’ajout suivant :
[…]. Where possible and not as a prerequisite, third parties affected by illegal content […]
ARTICLE 16
L’exemption des petites entreprises des obligations de diligence raisonnable et des plateformes « moyennes » de certaines de ces obligations constitue un danger pour l’Institut.
Cette disposition est basée sur l’hypothèse erronée que ces plateformes n’auraient pas les moyens de mettre en œuvre ces mesures. Mais c’est un principe très dangereux surtout pour la protection des consommateurs européens exposés aux risques des contenus illégaux. Les obligations devraient s’appliquer à tous types de plateformes, les dangers sont aussi importants pour les utilisateurs sur les petites et moyennes plateformes que sur les grandes.
ARTICLE 2 – KYBC (Know Your Business Customer) – CONSIDERANT 49
Le principe de vérification des vendeurs est un article phare pour les entreprises européennes. Limiter les obligations aux seules « marketplaces » est une occasion manquée de s’attaquer au large éventail des contenus illégaux et aux produits contrefaits, dangereux ou non conformes. L’INSTITUT considère que ce n’est pas un système de surveillance des clients professionnels, mais simplement une extension de l’obligation d’identification des partenaires commerciaux à tous les intermédiaires d’internet et soutient la position de la Commission et du Conseil. Les propositions actuellement en discussion sont trop restrictives en se limitant aux marketplaces.
Il serait intéressant de tenter une solution de compromis qui permette d’étendre l’exemption à toutes les plateformes peut-être sur la base de la proposition de la Commission européenne en acceptant l’exclusion seulement des très petites entreprises et les très petites plateformes.
LES MOTEURS DE RECHERCHES
Enfin, l’INSTITUT se félicite de l’inclusion des moteurs de recherche depuis le trilogue du 15 mars.
Cependant il y a encore une hésitation sur la place qu’ils doivent occuper dans le texte. Faut-il les considérer comme des services de « cache » ou d’hébergement ?
L’INSTITUT considère qu’il faudrait pouvoir s’extraire de ce débat. Le DSA est un règlement qui doit être efficace dans la lutte contre les contenus illégaux. Il faut donc conserver cette légitimité au texte et soumettre les moteurs de recherche au signalement et au retrait de contenus. Il faut s’attacher à parvenir à une responsabilisation des moteurs de recherches en évitant l’écueil de la classification qui sera très compliquée.
Enfinl’Institut, et alors que l’on voit se mettre en place en Europe l’application du droit voisin de la presse, tel que défini dans la Directive Droit d’auteur, de manière efficace et que le texte de cette directive rend les négociations avec Google, certes encore difficiles, mais incontournables, il nous semble primordial d’éviter absolument que le DSA puisse devenir un frein à cet essor économique essentiel pour la presse européenne. Ainsi, privilégier une sorte d’ « exemption » de responsabilité sur les résultats encouragerait inexorablement les moteurs de recherche à estimer ne rien devoir aux éditeurs de presse au nom du droit voisin sur les extraits de leurs contenus. C’est donc bien la définition d’HEBERGEUR qui convient aux moteurs de recherches.